Sunday, May 31, 2009

31 May, 2009 : Soirée BBQ

Aujourd'hui, journée tranquille (enfin!), et dernier jour du mois de mai. Cela fait maintenant un mois que nous vous avons quittés.

Nous avons profité d'avoir une voiture en location pour visiter un peu le coin. Notre destination d'aujourd'hui: Fort Saskatchewan, à 37 km au nord-est d'Edmonton. En route, nous avons vu des derricks et des raffineries: l'Alberta est le premier producteur de pétrole du Canada, que ce soit par extraction directe ou par sables bitumineux. Les garçons étaient tellement impressionnés par les torchères allumées qu'ils ont à peine remarqué l'énorme train de marchandise trans-continental qui filait doucement de l'autre côté de la route.

Le fait d'avoir pris l'autoroute nous a bien laissé le temps d'observer le comportement des gens au volant. Ils sont généralement assez calmes, dépassant de peu la limite de vitesse (qui est entre 100 et 110 km l'heure) (pas comme les français, donc), et roulent généralement à droite (pas comme les américains, donc). Par contre, certains de leurs compatriotes ont un comportement qui ressemble bien plus aux cousins du sud: dépassement à droite, zigzags entre les voitures... Nous avons même pu voir un gars qui, ayant marre d'être coincé dans un embouteillage, a carrément traversé le bas-côté avec son pick-up (il n'y a pas de traduction en français) pour rejoindre une petite route sur le côté. Mais juste après, j'ai laissé une dame entrer devant nous sur l'autoroute: comme une française, elle a bien agité la main dans son rétroviseur pour me remercier... même peut-être un peu plus chaleureusement que n'aurait fait un français, qui se contente en général de lever tout simplement la main.... Les gens sont donc, dans l'ensemble, plutôt civilisés — du moins, dans cette partie de l'Alberta, en tout cas...

Une fois arrivés à FS, nous avons essayé de localiser le centre ville historique, mais n'avons pas été vraiment convaincus de l'avoir trouvé. On a donc pris des photos ce qu'on a trouvé: un centre ville typique d'une petite ville nord-américain, avec rues très larges



de toutes petites boutiques,


mais l'aspect moribond. J'ignore si le Canada connaît le même phénomène qu'aux Etats-Unis, où les petites villes s'étouffent, petit à petit, asphyxiées par l'absence d'emplois... En tout cas, ça ressemblait bien à une toute petite ville nord-américaine.

Après, nous avons trouvé la vieille gare, avec un 'caboose' (dernier wagon du train où vit le personnel) garé en station. Malheureusement, tous les sites historiques que nous voulions visiter, y compris le Fort Saskatchewan, avaient fermé depuis une minute (16h) avant notre arrivée dans la ville (16h01...).

Nous avons vu, un peu partout, le prix de l'essence à la pompe: $ 92,4 CAD au litre (taux d'échange à peu près 1 euro pour $1,60 CAD)... Quasiment deux fois moins cher qu'en France....

Je suis plutôt mitigée par ce petit déplacement: cela nous a permis de constater qu'il n'y a pas grande chose à voir, en dehors d'Edmonton, en tout cas, pas tout près, et... pas au nord-est. Apparemment, si nous étions partis à l'est, on aurait trouvé le premier parc naturel du Canada (1906), avec des troupeaux de bison, d'élan, de caribou, et de cerfs... avec plus de 100 km de pistes pour marcher! Mais il est vrai qu'avec le coude d'Adnan, nous ne pouvons pas encore faire de grande sortie. Toutefois, cette visite a permis aux enfants de s'étirer un peu les jambes, même si tout le monde n'en a pas profité de la même façon...

Ensuite, une fois de retour à la maison, c'était notre deuxième soirée BBQ (avec Tahar, nous avons acheté le nécessaire cette semaine). N'est-il pas beau???


Ce soir au menu: des travers de porc à la sauce barbecue (BBQ Pork Ribs). Mmmmh! Cela doit faire bien 20 ans que je n'ai pas mangé ça, et pourtant c'est si bon...

Un petit soleil, un petit vent ... le temps et la journée furent agréables, quoiqu'un peu frisquets: à peine 13° C aujourd'hui. Ça fait une bonne différence par rapport aux 20° dont nous avions l'habitude... Tahar a parlé à son cousin du Québec tout à l'heure qui disait lui aussi qu'il avait fait frais aujourd'hui, sauf que chez lui à Montréal, il a fait 6°C... Que ce soit dit: les québécois ont jusqu'à la fin du mois de juillet pour réchauffer leur province (!), car non seulement nous avons décidé de prolongé notre séjour canadien à Edmonton jusqu'à fin juillet, mais nous allons aussi profiter d'être de ce côté-ci de l'Atlantique pour prendre quelques vacances: nous avons organisé un stop à Montréal pendant quelques jours avant de reprendre l'avion le 3 août pour revenir en France (arrivée donc le matin du 4 août).

Un scoop: la qualité du service client chez Air Canada est vraiment exceptionnelle. J'ai passé pas mal de temps avec eux au téléphone ces derniers temps afin d'organiser nos pérégrinations, et j'ai vraiment été frappée par leur patience, leur cordialité, et ce petit 'plus' qui leur fait penser aux petits détails avant moi, comme par exemple, le fait de penser à nous faire voyager, assis tous ensemble. J'allais le dire, mais le jeune homme y a été plus vite, avec une amabilité touchante... Sur l'inspiration du moment, j'ai écrit un petit mot de remerciement au service clientèle d'Air Canada (sur leur site, qui est vachement bien fait, on trouve facilement leur adresse email pour leur faire part des "plaintes, problèmes ou compliments"). Cette dernière case m'a bien fait rigolé; j'ai bien compris qu'on s'adresse à eux avant tout pour se plaindre. Eh bien! Ils ont été tellement contents de mes compliments qu'ils m'ont fait une offre promotionnelle de moins 5% sur tout achat de billet à l'avenir... Comme quoi!

Friday, May 29, 2009

29 May, 2009 : La vie ralentit parfois tellement…

Depuis le mois de janvier, et le début de mon congé sabbatique, j'ai été frappée par combien la vie peut ralentir sa course, voire s'arrêter totalement: lors de mon accident de cheval au mois de février, par exemple, j'ai été particulièrement frappée par cette sensation. On court, on court, et puis, plus rien. Tout s’arrête, et l’on se rend compte que la vie tient à peu de chose.

Il se trouve que cette semaine encore, cette sensation resurgit avec une nouvelle intensité. L'organisation quotidienne de nos vies peut être si facilement bousculée…

Mercredi après-midi, après l'école, Adnan est parti jouer au foot avec les copains. Il est très apprécié ici. Par rapport aux autres enfants, qui ne jouent pas en équipe, il est particulièrement doué, ce qui fait de lui un peu la star. Vous qui le connaissez bien savez combien ça lui fait plaisir d’être aussi mis en valeur. C’est sympa pour lui.

Son rôle désigné, c’est d’être gardien. C’est déjà un poste qu’il convoitait depuis quelques temps, lorsqu’il jouait avec son équipe à Chamalières. Alors qu’ici, ce même poste fait de lui la cible de l’admiration des autres enfants de l’école ; il s’y donne avec beaucoup de cœur.

Hélas, il s’y donne aussi avec un peu de bêtise. En attendant que le ballon lui revienne, notre cher Adnan a sauté pour attraper la barre transversale du goal. Mais, comme il avait mis ses gants de gardien, ses mains ont glissé. Et Adnan est tombé, et en tombant s’est cassé le coude.

Un accident vraiment bête. Mais bon, le plus souvent, c’est comme ça. Nous sommes nombreux à en savoir quelque chose, je pense …

Heureusement, l’hôpital est juste à côté. Urgences, radio, anesthésie générale pour remettre le coude en place et lui mettre deux broches plus un plâtre qu’il gardera trois semaines, puis rééducation pendant 3-4 semaines.

Adnan a été d’un courage remarquable pendant tout le déroulement de cette épisode canadienne. Il a eu, tout de même, un moment difficile, avec quelques larmes et beaucoup de chagrin, lorsque nous avons reçu la confirmation de la fracture et qu’il a appris qu’on allait l’endormir. Mais comme c’est un garçon raisonnable, il a bien écouté nos explications et a vite reconnu que le tout était pour son bien.

Depuis sa chute, il est à la maison — pas encore d’école pour ce garçon — à essayer d’apprendre à vivre lentement, sans bouger. C’est dur, dur, et il s’ennuie, lui qui n’arrive pas à rester en place longtemps !!! Mais il arrive quand même à nous faire quelques beaux sourires. Celles-ci ont été prises cet après-midi. Vous verrez bien qu’Adnan commence déjà à se sentir un peu mieux…

J’ai pu rester avec lui jusqu’à ce qu’il soit endormi dans la salle opératoire ; ça fait un bien drôle d’effet de voir le visage de ton enfant d’un coup figé… Je n’aime pas trop y assister, en fait, ça me rappelle encore avec trop de peine et de « feeling bizarre » le matin d’il y a un an quand j’ai dû amener Edy la faire endormir… mais voilà, je l’ai fait pour Adnan. Je pense qu’il s’est senti bien rassuré.

J’ai donc quitté Adnan comme ça. En sortant de la salle opératoire vers 21h15, j’ai éprouvé un grand besoin de secouer les bras, un peu comme s’ils avaient été recouverts d’eau. J’avais des glaçons qui me couraient dans les bras. Cela avait été une bien mauvaise journée, car le matin même ma grand-mère était décédée.

Alors, je sais que la plupart d’entre vous ne la connaissent pas, mais j’ai voulu vous raconter un peu son histoire afin de la faire vivre un peu plus longtemps dans l’esprit de ceux qui liront ces pages.

Née dans la petite ville de Pipestone, Minnesota, le 11 décembre 1922, de père allemand (« Grandpa Fred ») et de mère écossaise (« Grandma Mabel »), Harriet y a passé quasiment toute sa vie, un fait assez extraordinaire comparé à la mobilité nationale de la génération de l’après-guerre. Après avoir terminé ses études de lycée, en 1940, elle s’est inscrite à l’Université de Macalester, à St. Paul, Minnesota. Elle a interrompu ses études pendant la guerre afin de travailler à Washington D.C. A la fin de la guerre, elle est retournée dans sa ville natale, où elle a rencontré Boyd (Bud) Dressen, qu’elle a épousé et avec qui elle a commencé à élever sa famille : deux filles (mes tantes Dale et Jayne), et deux garçons (mon oncle John) et mon père (Dan). Quand j’étais enfant, j’adorais aller dans la chambre de ma grand-mère, admirer les belles photos en noir et blanc, prises de ses quatre enfants quand ils étaient bébé et qu’elle avait alignées sur le mur au-dessus de son lit — elles y étaient encore en juillet dernier lorsque je lui au rendu visite. Egalement j’ai toujours été fascinée par sa bague, en or, qui contenait quatre pierres, chacune ayant la couleur du mois de naissance d’un de ses enfants…

Sa vie a durablement changé lorsque, en 1955, son mari a eu un accident d’avion pendant une leçon de vol, et elle s’est retrouvée seule, avec quatre enfants à élever. Mon père, à l’époque, avait tout juste 4 ans. Après avoir brièvement travaillé pour son père, dans son magasin de meubles, puis ensuite comme secrétaire, elle a repris ses études à l’Université du Sud Dakota, où elle a obtenu son certificat d’enseignant de littérature anglaise en 1966. Pendant les deux années qui suivirent, elle faisait des déplacements quotidiens à 50 kilomètres de Pipestone afin d’enseigner dans des écoles publics, pour revenir enfin à Pipestone, au lycée, en tant que professeur de littérature anglaise, où elle a travaillé jusqu’à sa retraite, presque 20 ans plus tard. Peu de temps après sa titularisation au lycée de Pipestone, elle a de nouveau repris ses études afin d’obtenir un Master.

Ses parents, tous les deux instituteurs, ont beaucoup pesé sur sa certitude de l’importance de l’éducation dans la vie, et elle a toujours œuvré pour instauré cette même certitude chez ses enfants, ses petits enfants, ainsi que beaucoup d’autres qu’elle a rencontrés. Ce besoin de vivre par son éducation et par ses connaissances brille encore fortement à la génération de ses arrière petits enfants, ainsi que chez ceux qu’elle touche encore indirectement, à travers l’envie qu’elle nous a inculqué, à tous, d’apprendre aux autres de vivre par leur intelligence. Récemment, je me suis retrouvée en train de prêter un livre dont ma grand-mère m’avait fait cadeau lorsque j’avais 13-14 ans. C’était « La perle » de John Steinbeck, une œuvre qu’elle avait enseignée pendant de nombreuses années au lycée. Je l’ai prêté, sans trop réfléchir à mon attachement au livre, à une étudiante de mon Master de Communication Technique qui est passionnée de Steinbeck et qui aimerait un jour devenir écrivain… Je ne pense pas qu’elle lise dans les pages de ce livre combien il m’attachait à ma grand-mère…

C’était aussi une force stable dans nos vies, toujours là pour donner un coup de main ou soutenir un de ses enfants ou ses petits enfants, soit par sa force physique (quand je pense au nombre de fois qu’elle nous a aidé à déménager… !), sa force intellectuelle, son calme, et son sacrifice.Bien évidemment, je ne parle que pour moi-même, mais l’histoire est déjà édifiante : lors de ma période « cheval », pendant ma pré-adolescence, ma grand-mère a eu la corvée de nous accompagner, une copine et moi, et ce pendant quelques années de suite, à 6h30 du matin l’été tous les jours pendant un mois chez une dame qui nous faisait travailler et monter à cheval. Puis, elle revenait nous chercher après le repas de midi, nous ramenait chez elle où elle nous faisait travailler le violon, et après, nous amenait, sans faille, passer le reste de l’après-midi à la piscine. Sans jamais montrer la moindre impatience, sans jamais nous faire sentir que nous la fatiguions. Elle disait ce qu’elle avait à dire, sans reproches, sans jamais nous réduire en les imbéciles que nous étions sûrement … même lorsqu’on s’est manifestement trompé. Je me souviens d’une fois, je devais avoir 3-4 ans, on s’était levés tôt pour rentrer à la maison depuis Pipestone, un voyage qui durait 3 heures et demie. Elle m’avait bien rappelé que j’allais être malade en voiture, mais m’a quand même laissé m’empiffrer de « Lucky Charms », des petites céréales au blé avec des petits bouts de marshmallow. Un délice ! Sauf quand on doit prendre la voiture après… Effectivement, même pas 20 minutes après notre départ, je commençais à me sentir pas trop bien. Mon père s’énervait de plus en plus : quand on peut éviter d’être stupide, faut le faire. Ma grand-mère, calmement, m’a fait poser ma tête sur son genou pendant qu’elle me caressait doucement la tête. Lorsque je lui ai vomi dessus, elle n’a rien dit ; elle a simplement vidé son sac à main par terre à ses pieds afin de recevoir le deuxième envoi, qui a suivi de peu…

C’était une femme forte et calme, indépendante et active, fortement impliquée dans la vie de son lycée, de sa communauté, et de son église. Pendant près de 50 ans, elle y a été l’organiste et dirigeante du chœur, et dirigeante d’autres groupes de musique jusqu’à ses 80 ans. Elle était professeur de piano pour les enfants de Pipestone pendant 40 ans. Je me souviens des enfants qui défilaient chez elle pendant les vacances d’été ; ils s’enfermaient dans la première chambre au bout du séjour. Ces séances gardaient toujours un certain mystère pour moi, et j’aimais, lorsque j’y étais autorisée, à assister aux leçons afin d’observer les pieds des enfants et de ma grand-mère actionner les pédales du piano… C’était une passionnée de la lecture de son journal quotidien, du bridge, qu’elle jouait encore avec ses copines, une fois par semaine, et du golfe, qu’elle a été obligée d’arrêter après une opération du dos il y a quelques années. Il y a trois semaines encore elle se déplaçait avec sa voiture ; c’est d’ailleurs lors de son dernier déplacement, pendant lequel elle a eu un accident suite à une perte de connaissance, que l’on a pris connaissance de sa maladie.

Malgré sa chute rapide et son décès qui a suivi de peu, nous avons quand même pu constater qu’elle restait elle-même jusqu’au bout : elle avait soigneusement tout organisé, de telle sorte que lorsqu’elle s’est retrouvée paralysée, dans le coma la semaine dernière, elle avait néanmoins pu orchestrer l’arrêt des soins intensifs. Puis, par sa force, elle a fait patienter la mort pendant encore quelques jours, jusqu’au moment où elle a décidé de s’en aller. C’est toute une histoire qui nous quitte, ma grand-mère, qu’on appelait « Grandma Heart » (Grand-mère Cœur), à cause de ma petite sœur qui, quand elle était petite, n’arrivait pas à dire « Harriet ».

Quand vient le moment de dire au revoir, on est toujours frappé par combien c’est affreusement dur. Combien on a du mal à avaler la finalité de la mort. Mais depuis toute sa vie, ma grand-mère « cœur » nous prépare à ce moment, en nous montrant comment devenir grands.

Grandma Heart ! Nous avons à la fois une très grande peine à la voir partir et une très grande joie à l’avoir connue, entière, jusqu’à la fin …

Tuesday, May 26, 2009

26 May, 2009 : Enchant...

Ayant enfin réussi à louer une voiture, ce soir je suis partie à l'aventure: j'ai laissé mes garçons à la maison pour reprendre mes activités équestres. Le centre équestre à 10 minutes à pied de la maison n’ayant pas de place (dommage!), j’ai dû me résoudre à sortir de la ville d’Edmonton. Pour me faire plaisir, je suis donc allée là où le nom et le site m’avaient enchantée lorsque j’avais commencé à faire mes recherches (Spoons Arabians), en janvier dernier (oui, certains d’entre vous savent que j’ai trouvé mon centre avant de trouver une maison!)

Mais comme toujours, la première fois qu’on veut aller quelque part, ça ne se passe jamais exactement comme on veut. Tranquille, avec mon itinéraire relevé sur GoogleMap à la main, je suis partie vers 18h30… Je devais y être pour 19h, afin de préparer ma monture pour 19h30. Pas de problème!

J’ai suivi les instructions, et suis arrivé là où je devais être… selon Google. Et j’ai roulé, j’ai roulé, j’ai roulé… assez longtemps, d’ailleurs, sans voir le centre. Au bout d’un moment, je me suis quand même arrêtée chez des gens, pour leur demander s’ils ne connaissaient pas, car je voyais que ce n’était pas bon du tout. Ils avaient l’air assez étonnés que je leur demande ce centre équestre, car il se situait en fait à une vingtaine de kilomètres ... au sud, mais par miracle, ils connaissaient la dame en question, lui ayant vendu une jeune jument deux semaines auparavant. C’est que Google m’avait envoyée dans la mauvaise direction!

Ils lui ont donc téléphoné de ma part, pour lui dire qu’ils me renvoyaient sur ma route, et avec mon nouvel itinéraire, je suis donc repartie…

Je suis arrivée avec finalement une petite heure de retard (seulement!) mais ai pu monter quand même. Pour les amateurs: j’ai monté une bien jolie petite jument arabe,
« Enchant », qui avait une très jolie tête.

Shelley, la propriétaire du centre, n’a que ça d’ailleurs : des arabes et des anglo-arabes qu’elle croise, élève et dresse elle-même. Je renoue donc avec mes amours d’enfance : le premier cheval que j’ai monté sérieusement était un petit arabe, aussi…

Ce qui est bien, c’est que je suis en reprise toute seule. J’avais donc ses yeux sur moi à tout moment (je ne pouvais rien lui cacher ! et elle a vite fait de pointer mes faiblesses…) mais j’espère que cette attention focalisée m’aidera à avancer sur certains points…

Sunday, May 24, 2009

24 May, 2009 : Le jardin des secrets

Etant toujours sans connexion Internet à la maison, et ayant une connexion plus que sporadique au café Internet du coin (avec beaucoup de café consommé...), vous allez devoir vous contenter de nos récits sur le blog, car j'ai pris pas mal de retard dans le traitement de mon courrier! Désolée pour ceux qui attendent une réponse personnalisée depuis un moment... vous allez devoir patienter encore un petit peu. Croisons les doigts pour que notre nouveau boîtier ADSL arrive bientôt...

Egalement, je vous tiens en haleine, je sais, mais je ne peux pas encore compléter les deuxième et troisième articles, qui font suite à « Les petits français sont-ils des sauvages...? » car j'ai besoin d'avoir accès à des documents que j'ai trouvés sur le Web afin de compléter le tout.

Mais.... en attendant, voici les derniers développements sur notre histoire avec la corde à linge. Je sais que vous attendiez impatiemment la suite de ce récit palpitant! Alors, comment vous dire… nous n'en avons toujours pas! En fait, il faut avoir une voiture pour en avoir car le magasin est bien trop loin pour y aller à pied ... Mais aujourd'hui nous avons repris espoir car tout à l'heure, lorsque nous travaillions dans le jardin, quelle n'a été notre surprise de regarder du côté de chez les voisins et avoir vu ceci ...


Ooof. Nous sommes sincèrement soulagés, car les monstres à la cave ne sont pas tendres avec notre fragile lessive. Regardez! On nous a mangé notre couette! Au début, j'ai cru qu'un chien sauvage et enragé avait attrapé la couette par le coin et s'était amusé à la déchiqueter...

Heureusement, nous serons bientôt tirés d'affaire: nous aurons prochainement une voiture, donc de la corde à linge, et bientôt le jardin sera en état pour pouvoir mettre notre linge à sécher dehors...

Avec Tahar, on a passé la journée à travailler dans le jardin. C'est un jardin qui n'a pas été entretenu depuis plusieurs années, ce qui est tout de même un peu nécessaire, même pour un jardin qui est censé nécessiter peu d’entretien, comme celui-ci … Souvent au cours de la journée, j'avais l'impression d'être dans le jardin des secrets. Au fur et à mesure que l'on retirait des couches de humus accumulées depuis le temps, on découvrait des petits charmes cachés. Tahar, le pragmatique de toujours, appelle ça plutôt « le jardin du travail » et même, sûrement plus juste que ma vision romantique, « la jungle ».

Voici un compte-rendu visuel de notre travail:

Jardin endormi sous la neige la semaine dernière:


Travail du départ, dimanche matin (24/05):


Travail à mi-chemin...


Tahar voulait aussi que vous puissiez comparer « mon » travail au « sien »... Si, si, je vous assure que l'idée vient de lui, et pas de moi! Vous savez bien que je ne suis pas comme ça…

Alors, devinette : sauriez-vous attribuer la bonne photo au bon jardinier ?


Et on y est presque ...


On y était encore ce soir à 22h passées — c’est comme une drogue ! — mais les moustiques commençaient à avoir raison de nous. En passant, nous nous estimons heureux. Je ne sais par quel miracle, mais nous nous retrouvons dans un coin de l'Amérique de Nord où les moustiques sont d'une taille « normale », et non de la taille de petit colibri, comme j'ai eu l'occasion d'en voir au Minnesota... Oui, c’est très charmant chez moi…

Encore une raison de plus de préférer le Canada aux Etats-Unis!

Bientôt, vous aurez la suite des images. Je vous promets de vous tenir au courant de nos progrès...

Friday, May 22, 2009

22 May, 2009 : Toujours en vie

Depuis quelques jours, je n'ai plus de connexion Internet à la maison. Une vraie prise de tête! Après avoir passé au moins deux heures au téléphone avec le fournisseur, depuis notre arrivée, je me retrouve sans boîtier ADSL. Heureusement qu'il existe des cafés Internet... mais je vous avoue que j'ai consommé beaucoup de café cette semaine! Ce matin, j'ai eu grand plaisir à réceptionner un coup de téléphone du fournisseur, avec message pré-enregistré, pour présenter leurs excuses. Palpitant... mais qu'ils se dépêchent de m'envoyer mon nouveau boîtier!

Voici que nous arrivons à la fin de notre troisième semaine au Canada, et que malgré le froid et la neige du début de la semaine, nous sommes toujours en vie. Même bien en vie... tellement que nous avons décidé de prolongé notre séjour jusqu'à la fin du mois de juillet, histoire de pouvoir profiter de notre séjour au maximum. Il est vrai que l'officier de l'immigration nous avait proposé de rester jusqu'au 31 août!

Je reviens aussi d'un déjeuner avec Tahar: aujourd'hui, nous avons mangé du sushi! Chaque semaine, nous essayons un nouveau restaurant ensemble. La semaine dernière, c'était du vietnamien (un bo-bun, mmm!), celle d'avant, du coréen (du bi-bim-bo, délicieux!). Aujourd'hui, j'ai le ventre plus qu'agréablement rempli: mon lunch-box sushi/tempura avec du riz et de la salade était très satisfaisant. A la fin du repas, la serveuse est revenue avec notre addition, mais à la place, Tahar a commandé une nouvelle assiette avec de la poulpe! Elle était assez surprise... malgré mon ventre déjà bien rempli, j'ai piqué quelques morceaux. Quel délice! C'est ce qu'on appelle de la gourmandise...

Mon récit en trois parties va donc devoir attendre la reprise de la connexion à la maison.... Mais en attendant, je peux vous dire que je suis sans nouvelles de mon père. C'est plutôt bon signe: comme on dit, no news is good news!

Tuesday, May 19, 2009

19 May, 2009 : Interlude hivernale...

Hier matin lorsque je suis sortie faire mon tour matinal, il faisait -5° C et IL NEIGEAIT! Les edmontoniens avaient l'air très peu embêtés par ce retour en arrière (pour eux, c'est toujours le printemps!) car ils étaient sortis en masse, afin de profiter d'une matinée de congé. Hier, c'était "Victoria Day", un jour férié.

Il a neigeoté toute la journée, sans que ça laisse de traces... Mais ce matin, lorsque nous avons ouvert les stores, quelle n'a été notre surprise!


Cette neige, qui est assez extraordinaire, a un fort effet sur moi... Mon père est en visite chez nous depuis hier, et doit déjà nous quitter demain, sa maman étant en train de s'éteindre...

Sunday, May 17, 2009

17 May, 2009 : Les petits français seraient-ils des sauvages ... ?

Chers amis, je suis désolée de vous avoir laissés sans nos nouvelles depuis 5 jours, mais je me suis retrouvée un peu essoufflée par mon rythme de rédaction! Un nouvel article tous les jours me faisait me coucher bien tard le soir…

Je me suis donc accordée une petite pause, histoire de souffler un peu. Mais depuis j’ai eu un peu de mal à retrouver mon clavier, d'une part parce que le temps passe vite, mais surtout parce que, je l'avoue, je suis crevée! Alors que je trouvais les garçons fatigués en milieu de semaine dernière, je ne devais pas me rendre compte de ma propre fatigue. Cela fait donc 2-3 jours qu'à 21h30 je dors... Donc, pas de blog, Dacia sans sommeil, c’est pas une blague !

Et puis, bien évidemment comme je m'endors très tôt… je me réveille dans la nuit, pour bouquiner une heure ou deux. C'est ainsi que je peux vous annoncer qu'à Edmonton, il fait jour vers 4h40... Officiellement, le soleil se lève à 5h29, mais l'autre matin, il faisait suffisamment jour pour que je voie tout dehors sans difficulté lorsque je me suis recouchée vers 4h45... C'est pour cette raison (trop de lumière dans la chambre) que nous nous étions mis à installer un drap par dessus nos stores (d'intérieur, des vénitiens, plutôt). Ce qui avait l'air d'aider au début, mais soudain l’autre jour je trouvais qu'il faisait jour dans la chambre très tôt... Tahar, dans sa volonté de bien suspendre les draps, pour éviter que ça ne tombe dans la nuit, oubliait en fait de fermer les vénitiens... Maintenant que tout est rentré dans l'ordre, je peux de nouveau reprendre ma plume...

Pendant mon silence, je réfléchissais tout de même à tout ce que j'avais à vous raconter; des événements s'étant accumulés, de journées bien remplies étant passées, le recul étant pris, je me retrouve ainsi avec une quantité de choses dans la tête. Ce que je vais maintenant vous raconter se divise gentiment en trois parties, qui au départ me semblaient isolées. Mais après les événements d'hier, je vois qu'elles sont finalement imbriquées les unes dans les autres...

Je commence donc avec la première partie, les petits français sont-ils des sauvages? Vous aurez peut-être compris qu'en plus de vous donner de nos nouvelles, ce blog sert aussi de lieu de réflexion sur l'interculturel: en quoi les canadiens sont-ils différents des français? en quoi sont-ils différents des américains? J'ai toujours entendu dire que les canadiens n'étaient ni américains ni européens, ou plutôt, qu'ils étaient à la fois comme les américains, mais pas totalement, étant aussi comme les européens. Je pense que les différences entre la France et l'Alberta pourrait vous intéresser plus particulièrement, mais en tant qu’américaine, je recherche aussi les petites différences — très peu visibles — dans les différences culturelles avec les cousins plus au sud... J'ignore si je parviendrai à beaucoup éclaircir ce dernier point, mais allons-y...

Vendredi après-midi je travaillais à la maison, assise à mon bureau, lorsque le téléphone sonne. Je décroche: c'est l'école. Et non seulement c'est l'école, ce que craint tout parent, mais c'est la principale en personne. Aïe aïe aïe ...

« Oui? » je réponds avec trépidation. Ce n'est jamais une bonne nouvelle...

Elle me raconte qu’elle a récupéré Adnan et Ismaël dans son bureau, qu’ils ont été virés de la classe par la maîtresse, parce qu'ils se battaient, et dérangeaient le bon déroulement de la classe. Apparemment, c'est un problème qui durait depuis leur arrivée, la maîtresse leur avait accordé du temps d'adaptation, mais là, elle en avait eu assez.

Comme je vous avais déjà raconté, Ismaël et Adnan se sont retrouvés dans la même classe, à deux niveaux (3rd et 4th grade). Lorsque les deux garçons avaient été placés ensemble dans la même classe le premier jour, avec Tahar on s'est regardés, assez interloqués... Bon. Laissons donc faire. De toutes les façons, il n'y avait pas le choix.

La principale les avait donc récupérés, les avait placés dans la "time-out room", un concept qui date de l’éducation nord-américaine des années 80 et 90, lorsque cela devenait vraiment mal vu de frapper ses enfants quand ils faisaient des âneries… au lieu de les frapper, on les éloigne et les met au calme pour qu’ils se calment, mais il faut dire que ça laisse aussi au parent la possibilité de ne pas aller jusqu’au bout de son énervement, pour que lui aussi se calme. La principale m'appelait donc à la maison pour m'en informer. Egalement, j'ai eu le plaisir d'apprendre que si ça recommençait, ils seraient renvoyés à la maison pour la journée.

« Mmm, je vois. Merci d'avoir téléphoné. » On raccroche.

Dans cette histoire, il y a l'inconvénient évident — assez énorme — que si les enfants se font virés de l'école, notre mission en venant ici aura échoué. Les enfants ne seront plus scolarisés en anglais, et moi, ben… le livre qui attend si patiemment que je termine de l’écrire sera de nouveau remis aux calendes grecques...

Pas possible, donc. Mais comment faire pour éviter que cela ne se produise? Comment faire pour éviter que deux frères ne se disputent? Plutôt leur demander d'arrêter de respirer... ! Dans une fratrie, la dispute fait partie de la vie entre frères, étant quelque part fondamentale à la construction de leurs identités, aussi désagréable soit-elle.

Puis il y a tout le problème d'une inadéquation entre un système éducatif dans lequel on travaillait jusqu'à présent (France) et le nouvel environnement. Alors oui, que faire? En quelque sorte, voici notre vrai premier conflit culturel, car les répercussions seraient de taille pour nous tous.

Après le coup de fil, je me remets au travail en commençant à réfléchir à tout ça…

Vers 15h30, les garçons passent la tête par la porte de l’entrée, avec l'air d'attendre une réaction particulière. Avec un calme qui devait les inquiéter, je les fais s'installer à table, sans rien dire de particulier. Ils prennent leur goûter. A la fin, Hadi me demande s'il peut jouer dehors... Adnan et Ismaël n’osant pas me demander, je mets tout de suite les choses au clair en leur annonçant qu'à mon avis, ils devaient rester à la maison afin de réfléchir, car ils devaient à tout prix trouver une solution à ce vrai problème...

Sans protester, ils se sont installés sur le canapé pour se gratter les méninges...

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Le récit que j'ai recueilli de la part des garçons est le suivant, toujours à prendre avec des pinceaux, bien entendu. Nous avons tous tendance à embellir nos histoires, surtout lorsque ça va plutôt mal...

Rien que de plus typique: Ismaël a asticoté Adnan, Adnan lui a répondu — en français, Ismaël s'est fait un malin plaisir à traduire les propos peu flatteurs de son frère à la classe, et Adnan, perdant de ses moyens, a bousculé son frère, pas très tendrement de l’avis partagé des deux garçons, mais il n'y a pas eu de sang, de coups, de chute, d'os cassé... Enfin, en toute apparence, une dispute assez typique. Sans plus.

Récit qui sera, bien entendu, complété la semaine prochaine lorsque j'aurai été voir la maîtresse...

Nous sommes-nous habitués à un niveau de violence dans notre quotidien, pour que cette dispute nous semble banale ? Ces petits français, seraient-ils donc des sauvages, incapables de se contrôler en public? incapables de se comporter en êtres ... civilisés? C'est une lecture de l'affaire. Soit. Mais il y a tout de même un certain nombre de points qui m’interpellent. Quelques réflexions:

1. Jamais, jamais l'école française ne nous aurait téléphoné (dérangés?) pour une dispute que je qualifie de mineure. Si encore, cela avait été violent, sanglant, etc., ou si les garçons avaient tapé un autre enfant mais bon...

2. S'il y a un problème entre frères, l'école aurait tout fait pour régler le problème 'intra-muros' avant de nous contacter ... Quelque part, on a l'impression que l'école en France s’implique plus dans l'éducation de ses charges. Alors qu'au Canada, les parents sont bien plus rapidement priés d'assumer leurs responsabilités en cas de problème, même relativement mineur.

3. Bien entendu, c'est aussi parce que les parents sont plus tenus à l'écart de l'école en France que les enseignants doivent travailler plus pour préserver la paix dans l’enceinte de l’école. Aux Etats-Unis, en tout cas, les parents sont beaucoup plus impliqués — et autorisés à l'être — dans la vie de l'école. Je suppose que c'est également le cas au Canada. Ce qui expliquerait peut-être le déplacement rapide de la prise en charge des problèmes vers la maison…

4. Paradoxalement, dans un milieu scolaire où les enfants remarquent qu'on les laisse plus libres, aussi bien en ce qui concerne le travail à l'école, que leur façon d'aborder le travail, que l’organisation de leur journée ... on leur laisse moins de liberté dans le comportement. Des comportements qui sont, d’une certaine manière, plus tolérés en France (combien de fois n’ai-je pas entendu « oh, mais laisse-les ; ce sont des garçons ! », ce qui me semblait toujours être une autorisation implicite à les laisser se comporter comme des sauvages…), ces mêmes comportements sont clairement moins tolérés par les canadiens, même entre frères.

5. Ma dernière observation nous mènera vers mon prochain article : les canadiens me semblent très sensibles et chatouilleux envers le manque de civilité. Mais d’autres observations que nous avons faites depuis notre arrivée nous permettent d’apprécier cette remarque sous une autre lumière …

Stay tuned !

Tuesday, May 12, 2009

12 May, 2009 : « Le canada, c'est nul »

Depuis hier, les gens du coin annonçaient du mauvais temps jusqu'à la fin de la semaine. Ce matin, grand ciel bleu et douceur aidant, nous avions du mal à les croire. Tout le monde est donc parti comme d'habitude, avec pull, sans blouson. Hadi, même, est parti en short. Il est vrai qu'il devait passer la journée dans un centre de science, avec ses camarades de classe.

Vers 10h, le vent s'est mis à souffler. Soudain, le ciel bleu a disparu, du moins du côté de la maison où je travaille dans la journée. "Pas d'inquiétude" me suis-je dit, "je suis sûre qu'il fait toujours beau de l'autre côté, comme les autres jours..."

Eh non...

Lorsque le soleil disparaît derrière les nuages à Edmonton, il peut faire assez frais, assez vite. Voyant comme le vent soufflait, sans soleil en plus, vers midi j'ai fait une pause dans mon travail pour apporter leurs blousons aux garçons, qui jouaient dans la cour de l'école après leur déjeuner. En passant devant la station du tram, j'ai vu une belle température s'afficher: 0° C. Je pensais que les enfants allaient avoir honte de me retrouver comme ça; ils étaient plutôt reconnaissants.

On était passés de 12° C ce matin, lorsque je suis sortie à 7h30, à 0°. Un bel écart... La blague locale m'est revenue à l'esprit: le seul mois où les habitants d'Edmonton n'ont pas vu de neige, c'est le mois de juillet.... Ça promet.

Vers 13h, ça commence: il neige, parfois d'assez gros flocons qui tombent. Voici ce qui nous attend pour cette nuit:


Les garçons sont rentrés de l'école à 15h30. Ils entrent dans la maison en coup de vent, faisant en même temps entrer tout l'air froid de l'extérieur. Hadi a les joues rouges et déclare "Il neige!"

Quand on sort ici, même ce midi quand il faisait 0°, on ne voit pas son haleine. L'air est tellement sec... à tel point que les cordes des violons n'arrêtent pas de sauter et ne tiennent pas en place. A tel point que la semaine dernière, lorsque nous accompagnions les enfants le deuxième jour, nous avons vu à l'arrêt du tram que ça affichait 4°. "Quatre degrés!" nous sommes-nous exclamés avec Tahar. "Il doit y avoir une erreur! On dirait pas... c'est pas possible." On ne sent pas le froid ici comme en France; l'air est tellement sec que ça passe un peu mieux — à part pour les violons et la peau, qui sèche douloureusement. Tout de même, 0°, ça se sentait ce midi ... ça devait être le vent.

Au bout d'un moment dans l'après-midi, comme il faisait froid et ils n'avaient pas trop envie de jouer dehors, Ismaël et Hadi viennent me voir, pour formuler une requête spéciale. C'est Ismaël qui se charge de me livrer le message: étant donné qu'on est mardi, et que normalement, en France, il n'y a pas école le mercredi, est-ce qu'ils pourraient jouer à la DS?

Non.

Pas même... 20 minutes?

Non.

"C'est nul, le Canada!" s'exclame Ismaël. "Quelle idée d'aller à l'école tous les jours! C'est pourri!"

Mais Ismaël, tu finis à 15h20, je ne vois pas trop de quoi tu te...

"J'ai décidé! Je n'irai plus à l'école le mercredi! En plus, j'ai raté la récré ce matin parce que je devais finir un travail! C'est nul! C'est nul, l'Amérique du Nord, parce qu'aux Etats-Unis, c'est pareil! J'aime pas le Canada! C'est pourri!"

La désillusion commencerait-elle à pointer le nez dans le bonheur canadien ?

Ce soir à table, les quatre garçons avaient l'air absolument claqués. Comme si l'air sec et le froid leur avaient drainé toute leur énergie. Ils avaient du mal à se tenir sans s'appuyer sur leurs coudes. Comme je n'avais pas de miroir à portée de main, je ne saurai vous dire si moi aussi, j'avais l'air aussi fatiguée. Pourtant je ne la sentais pas.

A presque mi-chemin de cette deuxième semaine, je perçois un petit essoufflement chez les troupes. On est fatigué, on est grognon, avec Tahar on a un éruption de boutons, sûrement dû à notre nouvelle alimentation... Ah! Que les marchés de Chamalières sont bien regrettés... Heureusement qu'on n'est pas en mois de 'r'... si en plus on devait rater nos huîtres du vendredi!

Envoyez-nous quelques rayons de soleil par la pensée, pour nous aider à remonter la pente... Le vent souffle bien fort ce soir... Vais-je bientôt commencer à vous faire un récit à la "Petite maison sur la prairie"...?

Sunday, May 10, 2009

10 May, 2009 : Les joies domestiques

Aujourd'hui, nous avons fait un peu mieux connaissance avec la maison. Tout d'abord, c'était la journée fatidique: nous n'avions plus de linge propre! Il fallait donc se résoudre à faire la lessive.

Récit d'une joie domestique, épisode 1
Heureusement, la maison est équipée: machine à laver, sèche-linge. Comme il faisait beau, on espérait mettre notre linge à sécher dehors. Mais alors, où trouver de la corde à linge?

Profitant de notre connexion Internet, je fais une petite recherche afin de localiser quelques magasins où on pourrait en trouver. Mais, assez rapidement, je tombe sur un article publié dans un quotidien local, à l'intitulé menaçant: ‘Ambitions des écologistes contrecarrées par l’interdiction d'utiliser de la corde à linge' :



Trouver l'article au lien suivant : http://www2.canada.com/edmontonjournal/news/story.html?k=83230&id=
22ba3991-83ae-4f6a-96cf-4fd2e11b4a4f

Un peu troublés par cette découverte — nous imaginons d'autres titres du jour, genre "Couple franco-américain emprisonné pour non-respect de l'interdiction d'utiliser de la corde à linge" — et soucieux d'éviter les problèmes avec les autorités locales, nous téléphonons à la femme du collègue de Tahar, histoire d’avoir la bonne version.

Nous lui racontons notre inquiétude, car d'après l'article dans l'Edmonton Journal, sont inclus dans cette catégorie, en plus de la corde à linge : les paraboles devant la maison, les blocs climatiseurs sur le toit, les récupérateurs d'eau de pluie, et les panneaux solaires...

Elle nous assure que cela fait au moins dix ans qu'elle met son linge à sécher dehors, dans son jardin, sur de la corde à linge, et qu'elle n'a jamais été inquiétée. Tout de même, elle reconnaît qu'elle est loin de connaître toutes les lois en vigueur. D'après elle, il s'agit sûrement d'une loi contre les nuisances et les excès: elle me raconte le cas d'un habitant d'Edmonton qui, voulant profiter au maximum du soleil en hiver pour chauffer sa maison, a fait construire une tour pour y installer des panneaux solaires. Seulement, la tour a empêché son voisin d'avoir du soleil chez lui...

Forts de ces assurances, nous sortons pour nous rendre au supermarché local, voir s'il n'y avait pas de cette cordé à linge (oui, oui, je sais, on est dimanche, et tout est ouvert: le rêve d'un super-président, car le pays n'arrête pas de tourner). Après avoir fait trois fois le tour du magasin, nous acceptons le triste constat qu'il n'y en a pas, et que tous nos vêtements vont rétrécir, premier passage dans un sèche-linge oblige ...

Bien heureusement, nous avons déjà décidé de manger moins; maintenant, il ne reste plus qu'à convaincre les garçons d'arrêter de grandir, aussi... même, s'ils pouvaient rétrécir un peu, ce serait parfait!

Nous rentrons donc, chargeons la machine à laver, nous mettons la lessive et le bouton sur la position 'marche', et attendons.... Nous attendons quelques minutes. Rien. 'Et si on tournait ce robinet? L'eau est peut-être coupée'. Gagné. La machine se met en route. Contents de nous, nous remontons afin de commencer à nous occuper du dîner.

Récit d'une joie domestique, épisode 2
Ce soir, nous avons préparé des boulettes d'agneau et boeuf — viande achetée hier au marché — dans une sauce tomate. Après réflection, nous décidons qu'il vaut mieux faire cuire les boulettes au four une vingtaine de minutes — comme d'habitude — avant de les mettre dans la sauce. Le tout cuit doucement... Soudain, la maison est remplie d'un hurlement qui fait sortir les enfants de la maison en se couvrant les oreilles. Les maisons ici, sont, comme aux US, toutes équipées d'une alarme incendie/détecteur de fumée. Moi, du temps où je vivais toute seule à Ann Arbor, je me faisais toujours un devoir de les déconnecter parce que ça se déclenche intempestivement, ça casse les oreilles, on n'arrive pas à l'arrêter, enfin bref.

Lors de notre arrivée la semaine dernière, la propriétaire nous a un peu honteusement avoué qu'elle n'avait pas réussi à remonter le détecteur dans la cuisine, ce à quoi je lui ai répondu que ce n'était pas grave, qu'on allait s'en occuper — alors qu'intérieurement je disais 'ha! quelle horreur! plutôt crever que le remettre!' D'ailleurs, je me suis dit qu'on n'encourait pas de vrai risque car... nous avions un deuxième à l'étage des chambres.

Eh bien, c'est celui-ci qui s'est déclenché, de toutes ses forces... Pauvres boulettes. Elles n'ont pas eu le temps de finir de cuire avant d'avoir été rapidement jetées dans la sauce... Et pourtant, je vous assure qu'elles ne brûlaient pas! Mais on ferait n'importe quoi pour arrêter ce bruit infernal...

Récit d'une joie domestique, épisode 3
Puis, Tahar descend dans la cave. Cela fait un moment qu'on n'entend plus la machine. D'en haut, j'entends 'ooooh là là'... Jamais un bon signe. Je descends à mon tour: de l'eau par terre, qui avait fuit du siphon. ... De l'eau un peu partout, quand même. Heureusement que le sol est en béton.

Récit d'une joie domestique, coda
Enfin, pour couronner le spectacle, nous sommes un peu plus tard en train de plier le linge, sec, chaud, petit... je respire, et il me semble sentir comme une odeur de parfum de femme. Je me laisse aller à mon imagination, et me dis que c'est la femme qui habitait cette maison avant (elle est maintenant décédée). Elle était artiste, et travaillait à la cave. Je continue de plier. Tahar arrive quelques minutes après pour s'y mettre à son tour. Soudain, il me dit: 'Mais, tu ne trouves pas que ça sent le Dune?" (ma marque de parfum favori). Oui, en effet. Etrange, étrange...

Nous finissons de remplir notre mission de pliage, et remontons dans la cuisine. En arrivant devant la salle de bain, je suis enveloppée ... de Dune. J'ai compris.

Ismaël, mon cher Ismaël, venait de me vider la moitié du flacon dans la maison... parce qu'il avait envie de le sentir, m'a-t-il dit. Ah, ces chers petits.... Parfois, je vous jure!

Saturday, May 9, 2009

09 May, 2009 : Samedi, jour du marché

Nous revenons de notre premier samedi de marché, un rituel que nous avons pensé à mettre dans nos bagages... Le marché d'Edmonton ("Farmers' market") a lieu sur toute l'année: c'est un marché couvert, qui a pris place dans une ancienne caserne de pompiers.

C'était très sympathique de découvrir cet endroit très vivant, de sentir et voir tous les produits (viande de
bison,viande de caribou, de très beaux chaussons en peau de...
quelque chose, des bonbons en sirop d'érable...ça, c'était franchement bon, un peu comme le 'fudge', pour les connaisseurs...), et de voir un peu plus ces canadiens qui nous entourent.

En plus, il n'y avait point besoin d'aller manger après, beaucoup de vendeurs ayant mis des échantillons de leurs saucisses, leurs pommes, etc. à disposition des passants. Il y avait également de la musique: écossaise, irlandaise, et même un peu de tendance 'country'...


Continuons tout de même avec notre petite étude comparative: Voici la liste de fruits et légumes, pris au marché par ma belle-mère (désolée, marâtre!) cette semaine à Paris:

Achetés pour 5€ 85:
1kg de brocoli
1kg de tomates
2 courgettes
1 aubergine
2 poivrons rouges
1 belle salade....
1 botte de blette

Et nous, comment nous sommes-nous tirés ce matin ?

3 x sacs de 4 belles tomates = $11 (≈ 2 kg)
3 x sacs de 12-15 tomates cerises chacun = $8
1 sac de 6 petits poivrons = $6
1 sac de haricots plats, ≈ 400-500 g = $5
1 sac de carottes, ≈500 g = $5
1 sac de 12 petites betteraves = $4
1 sac de très belles poires, ≈ 2kg = $10
12 oeufs = $6
500 g d'agneau haché = $8
500 g de boeuf type bourguignon = $5
1 kg de boeuf haché = $10

Je n'ose même pas faire la somme... En tout cas, c'est bien plus cher que le marché de Chamalières, même avec le taux de change!

Petite remarque positive devant l'étendue des dégâts: la viande ici, en termes de prix, est vraiment très intéressante. Toute la viande vendue sur ce marché provenait de fermes locales, et les animaux étaient exempts d'antibiotiques et d'hormones de croissance: du bio, quoi! Et bien moins cher que l'excellent Dugast de Chamalières, rue Lufbéry. Les vendeurs ont affiché des photos de nos futurs repas, et de leurs conditions d'élévage en liberté ... ils avaient l'air bien mignons et contents de vivre, ces petits cochons... De quoi mieux les manger, sans doute.


Après un effort vaillant de nous avoir accompagnés sur cette aventure, les garçons étaient CLAQUES (photo à droite; cliquer dessus pour agrandir). On sentait qu'ils avaient bien mérité qu'on s'arrête manger dans notre restaurant d'adoption: un 'diner' (prononcé 'daïn-r') pas loin de chez nous. C'était un type de restaurant très courant dans les années 50 et 60, qu'on voit souvent dans les films sur cette époque-là. On y trouve, à toute heure de la journée, à manger ce qu'on veut, on mange dans des 'booths', sur des banquettes en vinyle. Jugez par vous-mêmes de l'hétérogénéité de notre menu:

Tahar: une assiette de Pad Thaï
Dacia: 'Eggs Benedicte' (deux oeufs pochés, chacun posé sur un demi 'English muffin' sur une tranche de jambon, le tout couvert d'une sauce hollandaise)
Ismaël: un 'grilled cheese & tomato' + frites
Adnan: un 'grilled ham & cheese' + frites
Hadi: un hamburger au 'bacon & cheese" + frites

Nous sommes désormais connus, car en fin de repas, lorsque les garçons ont parlé de glace, la serveuse se souvenait exactement de ce qu'ils avaient pris la dernière fois.

Friday, May 8, 2009

08 May 2009 : On vous attend

Quand on écrit un blog, et l'on clique sur le bouton 'Publier', on envoie nos idées et nos paroles quelque part on ne sait où... On a un peu l'impression que tout part dans le vide.

Je me permets donc d'attirer votre attention sur la fonction 'Répondre à cet article', qui va vous permettre de faire un commentaire sur l'article du jour, à partager avec tout le monde. Vous pouvez ainsi nous rassurer que vous ne nous avez pas encore oubliés...

Voici un petit vademecum pour vous aider à le faire, si vous utilisez cette fonction pour la première fois:

1. Cliquer sur 'Répondre à cet article'.
2. Ecrire vos remarques dans la fenêtre qui apparaît. Même 'hello!' nous fera bien plaisir....
3. Choisir un profil, par exemple, 'Google account' (dans le menu déroulant 'Comment as').
4. Cliquer sur 'Post comment'.
5. Retaper le mot qui va apparaître sur votre écran ('Word verification').
6. Cliquer sur 'Finish'.
7. Vous connecter, en entrant vos adresse mail et mot de passe,
si vous avez déjà un compte Google.

Note: Si vous n'en avez pas, vous pouvez en créer un en cliquant sur
'Don't have a Google Account? Create an account now'
(en bas de la première fenêtre à droite).

A bientôt de vous lire!

Thursday, May 7, 2009

07 May 2009 : Le temps ralentit

Ce qui me frappe énormément, à la fin de cette première semaine canadienne, c'est la soudaine extensibilité du temps:
  • la journée de travail et d'école démarre plus tard, mais on se lève quand même relativement tôt. Nous avons donc l'impression d'avoir déjà fait pas mal de choses avant de commencer la journée.
  • les enfants sortent de l'école plus tôt, et la journée de travail est moins longue pour nous.
  • en rentrant vers 15h30, ils goûtent, ils font leur 30 minutes de lecture, ils regardent une petite épisode de 'Foot de Rue' sur Internet, ils font leur musique... ET ils ont encore le temps de sortir jouer devant la maison pendant au moins une heure...
  • comme il n'y a pas de 'devoirs' à superviser, nous, les parents, avons l'impression d'avoir plein de temps libre. A tel point que j'ai pu enfin reprendre mon violon...
  • nous mangeons relativement tôt, par rapport à nos habitudes: à table entre 18h30 et 19h. On mange, on discute...
  • les enfants prennent leur douche, on range la cuisine, prépare la cuisine pour le lendemain...
  • une fois propres, les garçons sont au lit, tranquillement avant 20h30, pour bouquiner un peu avant de dormir. Ceci est aussi un grand changement par rapport à notre rhythme infernal de cette année, où le fait de pouvoir éteindre les lumières chez les garçons à 21h15 était vécu comme une formidable victoire dans notre gestion du temps...
  • nous sommes, nous-mêmes au lit, relativement tôt, au plus tard vers 22h30, en train de bouquiner de notre côté...
Le tout se vit comme une bonne journée de vacances: pas de fatigue, pas de stresse, pas de course, avec cette sensation d'avoir un temps infini pour accomplir nos quelques gestes quotidiens. La journée paraît extensible, comme dans mes souvenirs d'enfance.

L'air canadien est, en plus, bon à respirer...

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Je peux maintenant vous donner la suite de l'histoire de la classe d'Adnan et d'Ismaël: en effet, il s'agissait de la classe entière qui se levait pour aller boire et aller aux toilettes à tout moment. A la fin de la journée, Ismaël avait toujours ses trois pièces, Adnan en avait deux (il avait eu une urgence!). Ainsi, ils ont pu s'offrir 10 à 15 minutes de temps libre sur l'ordinateur de la classe à la fin de la journée.

Ils s'en sont plutôt bien tirés. Mais cette expérience leur a aussi permis d'apprendre ce qu'était "la dette", certains élèves ayant été obligés de "s'endetter" pour finir la journée ...

Décidément, ce début de séjour canadien est très riche en expériences...

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Voici quelques photos du terrain de jeu à l'école, prises à l'heure de la pause midi. Trouvez-vous Ismaël et Adnan?

En cliquant dessus, vous aurez ainsi l'image sur tout l'écran. Pour revenir à la page précédente, il faut cliquer sur votre flèche de retour en arrière.

Wednesday, May 6, 2009

06 May 2009 : Premières impressions de l'école

Les garçons ont en effet déjà remarqué pas mal de différences, par rapport à la France, qui pourraient vous intéresser. Je vous les résume ici:

Organisation de la journée
Déjà, les garçons sont épatés car par rapport à la France, ils ont vraiment l'impression de ne rien faire, et d'être en vacances! Il est vrai que les rhythmes scolaires ne sont pas du tout les mêmes...

Leur journée démarre tranquillement à 9h. Il faut simplement qu'ils soient à l'école pour 8h50, lorsque ça sonne.

Hier, pour la deuxième journée, nous ne savions pas encore qu'en fait ça SONNE à 8h50 pour que les enfants entrent; nous pensions qu'il fallait qu'ils soient dans leur classe pour 8h50! Nous sommes donc arrivés, tout essoufflés et un peu stressés car craignant d'être en retard (on a quitté la maison à 8h44... encore une histoire à raconter).

Avec Adnan, on passe donc la tête par la porte de sa classe, pour constater qu'elle était ... VIDE! Les chaises n'avaient même pas encore été descendues des tables. Je lis sur le visage d'Adnan les mêmes interrogations qui devaient se trouver sur le mien: Où était donc tout le monde? C'était quoi, ce mystère? Qu'est-ce qu'on n'avait pas compris encore?

Deux secondes après, soulagement: ça sonne, et les enfants commencent à entrer par la porte de côté...

Proximité de la maison
En fait, une chose que je ne vous ai pas encore racontée, c'est que nous habitons littéralement à 3 minutes à pied de l'école ... le rêve! Regardez, on sort de la maison:



On descend notre petite allée à côté de la maison en direction de la rue:



On tourne à gauche, et là-bas, le bâtiment que vous voyez au fond, c'est l'école! (le truc blanc devant l'école, c'est le tram).



Depuis deux semaines, la ville d'Edmonton a ouvert une ligne de tram qui passe entre notre maison et l'école. L'énorme avantage, c'est qu'ils ont aussi construit un souterrain, ce qui permet aux enfants de ne traverser aucune rue. Assez rapidement, ils vont donc pouvoir aller à l'école tout seuls. Ce matin, Tahar les a accompagnés jusqu'à l'arrêt du tram, qui le dépose, lui, directement à la fac; Hadi, Adnan et Ismaël ont continué sur les derniers 50 mètres tout seuls...

En plus, le comble du bonheur: l'école possède un énorme terrain de récréation, avec terrains de foot, de baseball, et pleins de jeux:

[photos à venir...]

Quand on a découvert tout ça ce weekend, nous nous sommes empressés de sortir trouver un magasin de sport acheter un ballon de foot, pour qu'ils puissent en profiter. Déjà, tous les 4-5 'blocks' (pâtés de maisons, qui sont vraiment organisés en carrés réguliers, comme aux US), on trouve un autre parc, et puis il y a aussi... mais attendez! Je dois d'abord vous raconter ces impressions sur l'école avant de vous raconter la ville! Ce sera donc pour une prochaine fois...


La liberté des comportements
Ismaël et Adnan étaient tout surpris, impressionnés même, d'apprendre qu'ils pouvaient se lever quand ils voulaient pour aller aux toilettes et boire. Wow! Vous vous rendez compte? Alors, combien de fois, à votre avis, ont-ils profité de ce 'nouveau' systèm...? Vous qui connaissez Adnan, par exemple.... Oui, je vous vois en train de rigoler. Ismaël, non plus, n'est peut-être pas totalement innocent à mon avis ...


Premiers pas vers le capitalisme ...?

Une autre des choses que les garçons nous ont racontées après leur première journée, ce sont les règles de vie à l'école: faut payer! Par exemple, pour avoir le droit de prolonger la récré de 10 minutes, il faut payer $5. Pour pouvoir mettre les pieds sur la table, ça coûte $15. Tu veux mâcher du chewing-gum en classe? $10, please!

D'un certain point de vue, que je saisis, étant finalement de la même culture d'origine, l'école cherche à responsabiliser les enfants. Que s'ils veulent des choses dans la vie, ils doivent être prêts à fournir un effort. Sauf qu'ici, c'est un effort qui coûte... littéralement.

Réflexion de Tahar (vous allez le reconnaître): c'est aussi l'apprentissage d'un système fait pour les riches, car si on a de l'argent, on peut faire tout ce qu'on veut!

Y compris ne pas respecter les règles de vie en commun... Alors, nos enfants sont-ils des riches?


Problèmes de comportement dans la classe d'Ismaël et Adnan...

Pour illustrer ce dernier point, je vous raconte le message qu'ont rapporté Adnan et Ismaël de l'école hier: Désormais, ils doivent aller à l'école avec une bouteille d'eau et 3 x 25 cents. Pourquoi? Parce que les enfants de la classe abusent d'un système qui les laisse, librement, se lever boire et aller aux toilettes quand ils veulent.

Ils n'auront plus le droit de se lever pour boire (d'où la bouteille d'eau), et pour aller faire pipi, il va falloir désormais dépenser 25 cents pour le droit d'y aller. Si, à la fin de la journée, ils ont encore leurs trois sous sur la table, ils auront droit à 15 minutes de libre; deux sous, 10 minutes de libre, et ainsi de suite.

Une particularité du système scolaire et social anglo-saxon: comme dans toute société, tout le monde est censé savoir ce qui constitue un comportement convenable, i.e., 'la règle' (on a le droit de se lever en classe, mais on ne le fait pas, parce qu'on sait que ça dérange). Cette règle est souvent internalisée. Par conséquent, on n'a pas à poser de conditions externes et explicites pour encadrer le comportement (vous n'avez pas le droit d'y aller), ce n'est pas la peine parce que l'individu "s'autorégule". Les règles ne sont pas rappelées; ça va de soi.

C'est donc tout de même assez étonnant, qu'à la fin de l'année scolaire, au mois de mai, la maîtresse en soit encore à leur rappeler ces règles de base... quand même! En fine pédagogue, n'est-ce pas, je me suis même laissée aller à quelques petites réflections sur l'utilité d'un système qui laisse une entière liberté aux enfants... justement, ils doivent apprendre! Comment peut-on apprendre si la structure qu'on doit apprendre n'est pas explicite?

Nous avons donc rappelé à Adnan et à Ismaël que ne pas se lever pour aller aux toilettes ou boire est un comportement acquis à la fin du CP en France. Par conséquent, en bons parents ce matin, nous leur avons expliqué que comme ils sont capables de se contrôler, et ce depuis déjà des années, ils n'avaient pas à emmener de bouteille d'eau, et on leur a symboliquement donné à chacun trois pièces de monnaie: 1 centime d'euro, 2 centimes d'euro, et 5 centimes d'euro. Comme ça, on avait l'impression de ne pas tomber dans le piège de "On paie, on peut..." Et puis, pensait-on, la maîtresse allait être impressionnée par notre sagesse parentale...

Mais, pas si vite. Car que se passe-t-il lorsque des enfants, habitués à un système où les règles de comportement sont explicitées, ou en tout cas réitérées souvent comme à l'école primaire en France, arrivent dans un système où la règle est implicite? Où il règne une 'apparence' de liberté? Puisqu'on leur a dit qu'ils pouvaient...! Comme on dit, absence d'interdiction égale autorisation!

En réfléchissant à cet incident depuis que je vous écris, et en revoyant l'inquiétude d'Ismaël ce matin avant d'aller à l'école qui venait de comprendre qu'on n'allait pas lui donner 3 x 25 cents, comme lui avait dit sa maîtresse, je suis en train de me demander si la nouvelle règle instaurée dans la classe ne s'appliquait pas uniquement à nos enfants???

Affaire à suivre....

Enfin, liberté d'expression...
Hadi, étant un peu plus grand et du genre qui réfléchit aux choses, nous a rapporté des observations sur sa journée d'hier, où il mettait en valeur la différence des pratiques par rapport à la France.

La 6ème en France, on ne rigole plus. Ça bosse dur. Toute la journée.

Hier, dans la classe de Hadi, ils ont parlé de la Grèce antique, un sujet qui le passionne et qu'il avait déjà vu avec ses profs à Chamalières. Lui, qui a désormais l'habitude de prendre sagement des notes, de noter et recopier tout ce que dit le prof, a été vraiment impressionné, abasourdi même, par la liberté qui leur a été laissée pendant la leçon.

Il m'a expliqué, tout excité, que "les enfants n'écrivaient pas ce que disait le prof; on a lu un texte, et après, le prof voulait savoir ce qu'on en pensait! Et tu sais, on pouvait dire tout ce qu'on voulait! Mais vraiment! Tout!" Tout en me racontant la scène, le pauvre Hadi a un peu perdu l'usage de la parole, ne pouvant plus que secouer sa tête, devant son étonnement.

Il m'a montré ses notes, présentées sous forme de tableau:
1ère colonne: des éléments relevés dans le texte ou dans la discussion
2ème colonne: des questions ou réflections qui leur venaient à l'esprit, par rapport aux premiers points soulevés
3ème colonne: la relation entre ces premiers éléments et l'expérience personnelle de l'enfant

Et vous savez, ils pouvaient écrire tout ce qu'ils voulaient!


Et puis, la vie d'un enfant est faite pour autre chose que l'école et le travail

L'école se termine ici à 15h20. Une journée courte par rapport au 16h30 à l'école primaire et au 17h du collège en France.

De plus, il n'y a pas de devoirs — ni même de 'leçons' à apprendre. Tout au plus, le prof de Hadi demande à ce que tous les élèves de la classe lisent au moins 30 minutes par jour.

Lorsque j'ai été voir le prof de Hadi lundi après la classe, il m'a expliqué qu'à son avis, la vie d'un enfant est bien courte, et qu'on doit leur laisser le temps de la vivre.

Voilà pourquoi les enfants, tous les trois, ont vraiment l'impression d'être en vacances... Après l'école, ils sont, en théorie au moins, libres! En tout cas, ils prennent toujours le chemin de l'école avec empressement et plaisir. Nous verrons par la suite....

Tuesday, May 5, 2009

01 May 2009 : Arrivée au Canada

Arrivée au Canada: 01 May 2009
Heure locale: 19h05 (5h05, heure de Paris)
Durée du trajet: un peu moins de 22 heures

Premières impressions du pays: dis donc! les flics à l'immigration sont bien plus sympas qu'en France et surtout qu'aux Etats-Unis! On observe avec un oeil attentif le comportement décontracté de l'officier qui s'occupe de valider notre permis de travail. Il n'est clairement pas frappé par le syndrome de peur de l'Etranger. On a moins cette impression désagréable d'être épiés, que tous nos gestes et nos propos soient passés au peigne fin, enregistrés, comme fautes à utiliser contre nous. Il faut quand même faire attention. Mais je me laisse tout de même aller à une petite blague, histoire de tester l'ambiance, en disant que si ça continue à se pourrir en France, on serait peut-être obligés de revenir. Pas de réaction du type. Avec ahurissement, Tahar m'interpelle - en français - "Il ne faut jamais dire des choses pareils, surtout pas à un flic!" Mais je lui fais remarquer que j'avais soigneusement évité de dire que nous n'allions PAS rentrer en France, quand même... Faut jamais leur laisser l'impression qu'on va disparaître dans la nature. Le gars nous annonce, non sans fierté, que notre visa a une durée de validité de quatre mois, et que nous pouvons donc rester jusqu'au 31 août, histoire de profiter un peu plus du pays... ça laisse quand même rêveur, surtout moi qui avais prévu de rentrer en France pour début juillet.

On récupère nos valises: miracle! elles sont toutes les cinq ensemble, et sortent parmi les premiers. Maintenant il ne nous reste qu'à trouver comment arriver jusqu'à la maison... avec trois bambins bien fatigués, nos cinq valises, quatre violons, la trompette, la clarinette, ET nos sacs à dos.... faudrait louer un bus!

On se dirige vers un bureau de navettes: je présente notre cas. Je leur montre notre adresse, nos affaires, et me remets à eux. Commence la deuxième observation: les gens d'ici donnent l'impression de se pencher sur les problèmes, même lorsque ce ne sont pas les leurs, avec sérieux et amabilité. En gros, il n'y a pas de problème, car il y a toujours une solution. Ils la trouvent: une navette nous déposera en ville, et ils se chargent de nous appeler un taxi monospace pour nous faire parvenir jusqu'à chez nous. Ooof. Il est vrai qu'on les paie pour ça, mais on ne peut jamais acheter l'amabilité si elle n'est pas déjà là.

Le taxi nous attend à l'endroit prévu. Super! On monte dedans, avec toutes nos affaires, on commence à rouler, et l'on vance de ... à peu près 3 mètres: Ismaël se met à hurler. Il va vomir. C'est le seul qui n'a pas du tout dormi pendant tout le long du trajet, et maintenant il n'en peut plus, surtout d'être enfermé derrière, sans fenêtres...

Il sort marcher avec Tahar — je me retrouve noyée sous les sacs à dos, les instruments à l'arrière qu'on lâche sur moi. Ils remontent dans le taxi. Cette fois-ci, on avance de... 1 mètre. Il hurle de nouveau. Il redescend. Ça va mal. Tellement mal qu'il répond à peine lorsqu'un pompier super sympa lui dit 'Hey, buddy, you ok?' Ismaël est tellement mal en point que même lorsque le pompier lui propose de le faire monter dans son camion, il ne répond pas, ses yeux sont voilés ... Comme dirait Adnan, "Ouah, l'truc!"

Maintenant Ismaël refuse de remonter dans la voiture; il est trop mal. Tahar demande au chauffeur si c'est loin. Un peu quand même. Pas de choix. Ils remontent donc dans la voiture; on met Ismaël devant, sur les genoux de papa, la tête qui pend par la fenêtre. Tant pis pour l'interdiction des moins de 12 ans, à cause de l'airbag! On avance au moins, tant bien que mal, s'arrêtant tous les 100 mètres pour aérer Ismaël. Le chauffeur est d'une patience d'ange. Mais il est vrai que sa voiture est est un vieux modèle, qui n'a plus de suspension, avec une conduite très 'large' pour éviter tous les nouveaux nids-de-poule qui ont fait leur apparition depuis l'arrivée des beaux jours... De quoi rendre malade n'importe qui.

Enfin, on arrive. Petite maison, dans une petite rue tranquille.


La propriétaire qui nous loue la maison nous attend à l'intérieur. Elle nous fait la visite de la maison: les garçons sont ravis par leur chambre, avec deux lits superposés, et un en face. Ils se mettent tout de suite à défaire leurs bagages... et se mettent d'accord en moins de 2 minutes — sans se disputer en plus! — sur la distribution des lits. La proprio' finit de nous faire visiter: maison propre, calme, récemment rénovée, pas de moquette (donc moins de risque de crises d'asthme au milieu de la nuit!). Tout va bien. Elle me propose de m'amener faire quelques courses au supermarché local, sachant que nous n'avons rien à manger dans la maison (quel service!).

Je suis absolument estomaquée par les prix: 500 g de beurre = $7! Un pot de confiture = $4! Des carottes = 98 cents les 100 g! Je ressors avec deux petits sacs, de quoi faire deux repas (dîner léger + petit déj') = $120. Pourtant, les gens n'ont pas l'air affamé, mais nous, nous allons peut-être perdre un peu de poids pendant notre séjour canadien! Surtout, il faut bien mâcher et ne laisser aucune miette dans l'assiette....

A mon retour à la maison, les garçons sont profondément endormis dans le salon. Ils montent se coucher sans dîner. Chic! un repas de moins à assurer... ?

Monday, May 4, 2009

04 May 2009 : Premier jour d'école



Les garçons sont joyeusement partis à l'école pour leur première journée, après avoir résolu leurs dernières angoisses:

Ismaël: Mais je ne sais pas écrire en anglais! Je vais être nul! Tout le monde se moquera de moi !

Adnan: Je ne connais pas! Je ne saurai pas où aller!

Hadi: Est-ce que je vais réussir à me faire des nouveaux copains???

Mais si, vous verrez. Tout se passera très bien!


Après l'inscription, on voit Ismaël et Adnan qui partent dans la même salle de classe (classe à deux niveaux, 3rd and 4th grade, ou CE2 et CM1). La salle de classe de Hadi est juste en face, également à deux niveaux (5th and 6th grade, 6th grade étant l'équivalent de la 6ème en France).

Nous avons été chercher les enfants à midi pour manger avec eux à la maison... exceptionnellement, comme on n'a rien préparé à manger qu'ils puissent amener à l'école. A partir de maintenant, ils apporteront leur déjeuner (entendez "brown bag") avec eux à l'école, où ils auront le droit de manger dans leurs salles de classe avec leurs camarades, en buvant du lait distribué gratuitement par le gouvernement canadien.

Effectivement, au début, avec Tahar, on trouvait que $25 par enfant, par mois, pour manger à la cantine n'était pas cher du tout! Eh non! Ce n'est que le coût de la surveillance pendant la pause midi! C'est eux qui apportent de quoi manger. Ils ont un peu moins d'une heure pour manger: sortie des classes à 11h40, reprise à 12h25.

Encore une fois, les garçons risquent de perdre du poids! Eux qui ont l'habitude de manger les bons repas chauds et copieux de la cantine scolaire à Chamalières! Surtout Hadi... je prédis une grosse crise de fringale d'ici quelques jours, après ce régime de pique-nique... On va devoir passer à deux sandwiches, chacun. Heureusement qu'il ne fait pas trop froid, sinon on aurait besoin de leur préparer des repas chauds, à mettre dans des thermos: la prise de tête!

Les enfants, pourtant, étaient ravis après ce premier jour d'école. Déjà, ils sortent de l'école à 15h20, ce qui leur laisse bien le temps de faire autre chose que l'école. En plus, Adnan et Ismaël n'auront visiblement pas de devoirs, et quant à Hadi, sa seule obligation consiste en 30 minutes de lecture par jour. Des vacances! Enfin, presque... puisque nous avons prévu des photocopies généreusement préparées par les enseignants en France pour qu'ils puissent terminer le programme de l'année en cours. Les veinards!

Néanmoins, Adnan déclare que 'school is cool', Hadi est tout content parce qu'il a déjà été intégré à un groupe dans sa classe, et Ismaël a aimé les maths (surtout, je pense qu'il s'est rendu compte qu'il savait quand même des choses; grand soulagement).

Seul hic: Hadi a eu la mauvaise surprise de se retrouver assis à côté d'une fille dont il avait fait la connaissance dimanche au parc, qui est apparemment aussi bien "cruelle" qu' "odieuse".... Et puis, le fait qu'Adnan se retrouve dans la même classe que son petit frère ne lui plaît que moyennement... Ismaël, lui, est content de tout pour l'instant.

Ils ont été récompensés de cette journée bien remplie par une épisode de 'Foot de rue', vue sur le Web, suivie d'un documentaire de National Geographic sur le bébé mammouth découvert en mai 2007:

http://channel.nationalgeographic.com/episode/waking-the-baby-mammoth-3630/Overview

Ça ronflait sérieusement avant 8h30, après cette journée passée à naviguer toutes ces nouveautés.

Mais comme on dit ... so far, so good!